Un vendredi midi dans le quartier de l’Opéra. Les cadres en veste cintrée se pressent devant les petits restos du coin. Moi, je m’engouffre dans une drôle d’enseigne, non pas pour remplir mon estomac mais pour faire disparaître mes cernes. J’ai rendez-vous chez ZZZen, le premier bar à sieste de France. Vous l’ignoriez peut-être : en plus des bars à ongles et autres bars à chat, il existe à Paris un bar à dodo. Est-ce qu’on essaye vraiment de nous faire payer des minutes de sommeil ? Oui, mais ça peut valoir le coup. Suivez-moi, j’ai testé pour vous.
La sieste, une pratique à intégrer ?
C’est Virginie Yang, créatrice du bar à sieste ZZZen avec son mari Guillaume, qui m’accueille dans ce petit cocon parfumé sur fond de musique calme. Voix apaisée, regard doux derrière la frange brune, elle m’invite à laisser mes affaires dans un casier. Me délester de mes chaussures et de mon téléphone portable, c’est déjà un grand pas vers la relaxation.
La patronne me raconte qu’avant de se lancer dans le business du sommeil, elle a travaillé dans la banque et dans les cosmétiques. « Comme la plupart des salariés, j’étais tout le temps fatiguée. Je faisais des siestes dans les toilettes ou dans même des cabines UV… Et puis j’ai eu l’occasion de travailler à Pékin pendant trois ans. En Asie, on est très en avance sur ces questions. Les hommes d’affaires vont faire la sieste après les réunions, c’est totalement accepté ! »
Les Français ont besoin de sommeil !
A son retour à Paris, Virginie décide donc de créer un espace où l’on peut s’autoriser à dormir entre 15 et 45 minutes. Car c’est prouvé : les Français ont besoin de sommeil. Selon une étude de Santé Public France (mars 2019), nous dormons en moyenne 6h42 par jour, bien moins que les 7 heures minimales recommandées. Pire, le nombre de Français qui dorment moins de 6 heures par nuit augmente chaque année, surtout chez les jeunes. Cela explique peut-être le succès du Bar à Sieste, qui accueille en moyenne 30 clients par jour et a même mis en place un ZZZen Truck pour se déplacer dans les entreprises. Les habitués ? Souvent des salariés des boîtes de finance ou d’assurance du coin, pris d’un coup de barre après le déjeuner.
Il est temps pour moi de passer aux choses sérieuses. Virginie m’offre un café et présente les différentes options : le lit shiatsu, un matelas massant aux pierres de jade, le lit zzzen, un matelas ultra confortable à mémoire de forme, et le fauteuil massant « apesanteur ». Je choisis ce dernier et monte à l’étage avec mon hôte. Me voilà dans ce drôle de siège enveloppant, bien chaud. Virginie le règle à ma taille et m’invite à respirer profondément, à laisser circuler mes pensées comme si j’entrais en méditation. Elle pause sur mes oreilles un casque audio, ferme les rideaux autour de moi. Le fauteuil s’incline et je me retrouve comme en apesanteur, ni vraiment assise, ni vraiment allongée.
Les conditions de la détente
C’est parti pour 25 minutes seule avec la machine, une musique instrumentale calme en fond sonore. Je ferme les yeux et perds peu à peu mes repères. Le massage répétitif me berce, mes pensées vagabondent. Le temps passe bien plus vite que prévu. Je me dis que c’est le genre de luxe que tout le monde mérite. Je ne m’endors pas mais il faut dire que je suis novice. Il paraît que l’expérience paye en matière de sieste – plus on la pratique, plus on s’endort facilement. Quand le fauteuil s’arrête doucement, mon verdict est sans appel : j’ai passé un moment vraiment agréable, ressourçant. Je me sens un peu flottante, le retour à la réalité prend quelques minutes.
Vient ensuite le passage en caisse : ma petite sieste coûte 17 €. Tout bien réfléchi, le prix ne semble pas excessif. Ici, on ne paye pas le sommeil – ce serait aussi absurde que d’acheter de l’air à respirer… On s’offre les conditions de la détente, on décrète qu’on va prendre un moment pour soi. Et ça fait un bien fou !
- ZZZen – Bar à Sieste
- Ouvert de midi à 20 heures du lundi au samedi
- 29 passage Choiseul, Paris 2e
- Métro Quatre Septembre ou Pyramides